Vocation d’Abraham, père du peuple de Dieu (Gn 12, 1-4a); Psaume 32; Dieu nous appelle et nous éclaire (2 Tm 1, 8b-10); la Transfiguration (Mt 17 1-9)
Parfois le projet de Dieu pour chacun d'entre nous nous semble confus, caché, voilé. Et pourtant son intention est claire. Voici un exemple.
Prenez un sculpteur et son œuvre, la Pietà de Michel-Ange. On serait passé dans son atelier avant qu'il ait terminé,on aurait vu un bloc de marque, peut-être légèrement taillé, et pour notre œil non-aiguisé, cela ne ressemblerait à rien. Cependant, de l'intention de l'artiste surgit déjà le résultat final. Le résultat demeure mystérieux tant que l’œuvre n'est pas achevée. Il en est de même avec Dieu, Créateur, le plus grand de tous les artistes, qui a son propre projet pour chacun de nous. C'est ce que nous dit Saint Paul dans l'épître de ce Dimanche.
Paul nous rappelle que Dieu nous a sauvés et nous a appelés à une vocation sainte, non pas en raison de nos propres mérites ou de nos actions personnelles, mais à cause de son propre projet. Mettons-nous à l'écoute de ce projet. Nous recevons dans la Tradition, dans l'Histoire du Salut, dans les Ecritures cette compréhension du projet de Dieu. Il nous faut parfois remonter jusqu'à Abraham, voire Adam, pour comprendre la dynamique et la cohérence de l'Histoire Sainte. Entre "Au commencement, Dieu créa ..." et le dernier mot de la Bible dans l'Apocalypse, "Amen", il nous faut découvrir cette dynamique relatée dans la Bible et qui est en nous. Cette dynamique c'est la grâce de Dieu. Notre histoire personnelle est une histoire sainte. C'est le projet de Dieu pour chacun de ses enfants. Mais ce projet de Dieu ne s'impose pas de l'extérieur et auquel on devrait se soumettre platement. Que serait un Dieu qui exigerait une obéissance aveugle ? Dieu n'est pas violent. Il ne s'impose pas mais Il se propose. Notre liberté de Le choisir ou non fait également partie de son projet d'entrer ou non dans cette histoire, dans une Alliance avec Lui. Une histoire qui commence avec Abraham et son cheminement.
On avance, on quitte. Le texte hébreu nous dit : "quitter, partir, pour soi, vers soi". Dieu nous met en route pour nous même, pour nous accomplir. En effet, Dieu sait déjà ce que nous serons lorsque nous serons parvenus au sommet de nous-mêmes. Aujourd'hui, en cheminant avec Jésus, accompagnés de Pierre, Jacques et Jean vers le sommet de la montagne, on doit monter et découvrir à quel point nous sommes aimés de Dieu, pour pouvoir vivre ce chemin de Vie qu'Il nous propose. Souvent, nous posons un regard sur notre vie éloigné du regard de Dieu. N'oubliez pas ce que Dieu vous a dit dans le secret de votre cœur au jour de votre baptême: "Tu es mon fils bien-aimé, tu es ma fille bien aimée, en qui j'ai mis tout mon Amour. Il m'a plu de te choisir." Nous réentendons ce message aujourd'hui lors de la Transfiguration : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve toute ma joie." Toutes les autres paroles sur nous-mêmes ne nous font pas atteindre ce sommet d'Amour. Nous sommes faits pour une vocation extraordinaire ! Sur la montagne, avec Jésus, Dieu nous le dit avec force. Nous sommes faits pour nous accomplir. Ce que nous sommes dans le plan de Dieu nous ne le voyons pas encore. Mais quand nous nous verrons tels que nous sommes, nous verrons Dieu face à face. Nous sommes faits pour être partenaires, amis de Dieu, face à face.
Rentrer dans un chemin de vie en ayant déjà la conviction que nous irons aux sommets pour lesquels nos âmes sont faites. Nous ne sommes pas faits pour l' " à peu près" ou pour l' "à moitié". Notre cœur est fait pour la plénitude. La pédagogie de Dieu en Jésus consiste à récapituler nos espérances en son Fils. En lui se récapitule l'espérance folle d'Israël, c'est-à-dire, croire que l'Homme n'est pas le sujet, l'esclave de la volonté divine mais le partenaire idéal de Dieu et don qu'il doit se mettre en route et prendre sa place dans le monde pour dire "Je". Israël nous offre un monothéisme éthique qui nous invite à prendre notre responsabilité dans l'existence.
Pour atteindre ces sommets auxquels nos âmes sont promises, Dieu nous guide et ne nous laisse pas seul. Père, Il nous a donné Jésus-Christ son Fils, pour que nous puissions atteindre les sommets en traversant les vallées : les vallées des larmes, les vallées de la soif, les vallées de la Mort. Mais avec la Parole, avec cet encouragement, avec cette espérance et cette certitude que Dieu marche avec nous. Nous sommes à la Transfiguration et Jésus essaie de nous dire : "Voyez à quelle vocation sublime vous êtes appelés.Voyez en moi ce que vous recevrez du Père. Mais il faut redescendre de la montagne car on ne peut pas contempler la Gloire du Père indéfiniment. Nous avons des frères et des sœurs à appeler aussi. Traversons ensemble la vallée avec cette espérance. Moi, Jésus, je vais être persécuté, condamné, crucifié mais je ressusciterai". La descente de la Transfiguration nous conduit dans la vallée vers Jérusalem et la Croix qui pointe à l'horizon.
Le sommet que nous promet Jésus n'est pas un sommet de bien-être et de développement personnel, mais un sommet de réalisation. Ce sommet s'atteint en empruntant parfois un chemin violent, crucifiant. Et là, nous, chrétiens nous avons quelque chose à vivre. Comment être chrétien et vivre ce chemin de réalisation pour soi et pour les autres ? Croire en cette vocation transforme et illumine ; croire en cette vocation transfigure. La Transfiguration commence à partir de notre chair et de notre humanité blessée, mais appelée à la Sainteté. "Le Christ a détruit la Mort, il a fait resplendir la vie et l’immortalité par l’annonce de l’Évangile". Nous pouvons prier les uns pour les autres pour que nous réalisions toujours plus, durant ce chemin de Carême, en écoutant la Parole, ce à quoi nous sommes appelés; cette dignité que Dieu donne d'être ses enfants. Et prendre conscience que ce chemin vers nous-mêmes avec le Christ, est un chemin de Transfiguration. Voici comment Dieu bénit toutes les familles de la Terre, lorsque nous rentrons dans cette relation filiale avec le Père, dans le Christ.
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